mardi 28 mai 2013

Yeha et Axoum


Bonjour, 

Je vous emmène pendant trois reportages dans la région du Tigré. C'est le foyer historique de l'Abyssinie, depuis l'apparition de la civilisation axoumite. 

Nous sommes au nord de l'Ethiopie, sur les plateaux. Addis Abéba est à 800 km à vol d'oiseau. La frontière érythréenne (fermée depuis la guerre de 1998-2000) est toute proche. La mer rouge est à une centaine de kilomètre de là, mais 2500 mètres plus bas. La région du Tigré est déjà nettement plus chaude que celle d'Addis Abéba. On imagine la température suffocante des bords de mer. 


Nous avons atterri à Axoum et nous prenons tout de suite la route en direction d'Adoua, en direction de Yeha, le plus vieux monument d'Ethiopie, construits par les Sabéens (venus du Yemen) il y a 2800 ans. Sur la route, des constructions volcaniques comme ce sommet qui fait penser à une femme portant son enfant. 





Nous passons à Adoua. C'est là qu'en 1896 les troupes éthiopiennes de Menelik II ont battu les Italiens qui tentaient de coloniser l'Abyssinie. Première défaite infligée par un peuple africain à des Européens, avant celle des Japonais sur les Russes en 1905. Humiliation italienne qui expliquera la conquête mussolinienne en 1935. Fierté des Ethiopiens qui célèbrent la victoire d'Adoua chaque année en février. Grâce à elle, le pays a été le seul pays d'Afrique non colonisé (avec le petit Liberia).

La région est connue pour ses reliefs volcaniques très particuliers qui dominent un plateau profondément fracturé.



Nous arrivons à Yeha.


Le temple est malheureusement encerclé d'échafaudages. Des archéologues allemands l'étudient et le restaurent. C'est un temple sabéen de belle dimension.



Il est construit sans mortier. Les pierres sont simplement ajustées les unes aux autres. Ce sont des blocs qui font jusqu'à deux mètres de long. Nous admirons la régularité exceptionnelle de la taille des pierre. Rien n'a bougé depuis 2800 ans. 



Que voyez vous cette fois-ci dans la montagne?


Des sculptures sabéennes qui ont été retirées de la façade du temple
Au petit musée : stèle avec des inscriptions sabéennes


Dans ce petit musée, une belle bible du 15eme siècle.











Un prêtre nous accueille chaleureusement. Il  parle quelques mots de français.

En sortant, sur la place du village, un groupe de femmes et un groupe d'hommes attendent à l'ombre l'arrivée d'un cortège funèbre. Le notable de l'arrondissement est mort. Nous croiserons un très long cortège...



Nous rentrons ensuite à Axoum. C'est aujourd'hui une ville de 80.000 habitants, assez bien aménagée, calme. Elle a été la capitale d'une véritable civilisation entre le Ier et le VIe siècle de notre ère, s'étendant vers la péninsule arabique. Le royaume vivait du commerce entre les produits venus d'Afrique, l'Arabie et l'océan indien.

Autour de la ville, nous visitons des tombes souterraines. Seule une infime partie du patrimoine archéologique d'Axoum a été mise à jour jusqu'à présent.






Axoum est surtout connue aujourd'hui pour ses obélisques, monuments funéraires impressionnants. Celui que vous voyez au premier plan s'est effondré dès sa mise en place. Celui au second plan avait été emmené à Rome par les troupes de Mussolini. Il mesure 26 m de haut. Il a été pendant plusieurs décennies au Circo Massimo, en face de la FAO. Il a été restitué aux Ethiopiens au milieu de la décennie passée (mais n'a été remonté effectivement sur son emplacement qu'en 2008).





Sous les obélisques, des chambres funéraires.


Au-dessus, des écureuils







N'écoutant que son courage, Elie affronte les bêtes sauvages les plus impressionnantes pour nous ramener des photos de toute beauté....



Rue d'Axoum
 Nous nous rendons dans la grande église proche. A côté de la cathédrale, une petite chapelle fermée aux fidèles, gardée 24 h / 24h par un moine qui y consacre sa vie. C'est là qu'est conservé l'arche d'Alliance, subtilisé par Ménélik Ier, fils de la reine de Saba et du roi Salomon,  à Jérusalem et ramené en Ethiopie. Enfin, c'est ce qu'on nous dit. de toute façon, rares sont les initiés autorisés à voir les tables de la loi......


La grande cathédrale a été construite dans les années 60 par haile Selassié. Quelques tableaux contemporains la décorent.


Une jolie bible médiévale aussi que nous feuilletons. Voici les évangélistes..


J'aime bien ce petit lion de St Marc qui lève un coin de rideau....




Autour de la cathédrale, des centaines de pèlerins et de pauvres qui pour la plupart dorment dans les jardins. Nous sommes la veille des Rameaux.


Nous terminons notre journée axoumite en nous rendant à ce que le guide nous présente comme le palais de la reine de Saba. Honnête, il finit par reconnaître que c'est "selon la tradition orale". Selon les archéologues, ce serait un château du haut moyen âge. Mais notre guide nous dit qu'au fond il accorde plus de crédit à la tradition orale qu'aux travaux des scientifiques. C'est ça aussi l'Ethiopie contemporaine, écartelée entre son désir de modernité et sa fidélité aux traditions....


dimanche 12 mai 2013

Debre damo


Nous quittons Axoum au petit matin et reprenons la route d'Adoua. Très beau paysage de plateau éthiopien classique, fracturé par de profondes failles. Belle route neuve, relativement peu fréquentée mais qui requiert comme partout dans le pays de conduire avec beaucoup de prudence. Voici un exemple typique de la sécurité routière vue par les Ethiopiens. L'année dernière, il y a eu 12.000 morts sur les routes d'Ethiopie (souvent des piétons), alors qu'il doit y avoir 20 fois moins de voitures qu'en France. 


Nous arrivons en vue du monastère de Debre Damo, l'un des plus anciens d'Ethiopie (les origines remonteraient au 5eme siècle), perché sur sa table.

Nous sommes à quelques kilomètres de la frontière érythréenne, calme pour le moment (mais toujours fermée). Nous ne notons pas de mouvements militaires particuliers. Mais entre 1998 et 2000, c'est dans ce genre de paysage que les soldats éthiopiens et érythréens se sont battus durement (le conflt a fait plus de 100.000 morts).




Nous voici au pied du monastère. 


Mais nous ne sommes pas au bout de nos peines. Il y a encore cette falaise de 17 mètres à escalader.
Seuls les enfants et moi seront autorisés à le faire car le monastère est interdit aux femmes.


Gaëtan se lance le premier. Une corde pour grimper et une lanière de cuir serrée autour de la taille en sécurité, tirée depuis le haut par un moine.



C'est parti pour Gatou.



Une petite pause pour reprendre son souffle




C'est au tour d'Elie de se lancer.



Je peux vous dire que quand on arrive à mi-hauteur, les muscles des bras commencent à se tétaniser. pas très agréable comme sensation.





Le paradis, ça se mérite! Lors des grands pèlerinages, ce sont des centaines de personnes qui se lancent ainsi à l'assaut du monastère. 

Pour ce qui me concerne, vous ne verrez pas de photos car on ne peut pas tout faire. mais je vous assure que je l'ai fait. D'après Delphine, c'était nettement moins élégant que les enfants. mais bon, c'est le résultat qui compte....

Le monastère qui occupe toute la table rocheuse est constitué d'une église et d'une centaine de petites maisons en pierres sèches. Chacune est habitée par un moine qui a avec lui un serviteur (en général des adolescents qui veulent devenir moines). 






Nous voyons peu de moines car c'est manifestement l'heure de la sieste (ils prient toute la nuit). Seul le gazouillement des oiseaux brise le silence de l'air chaud. Gaëtan trouve quand même un chat...


Chaque maison a une citerne dans son jardinet. Elle se remplit pendant la saison des pluies. Officiellement, elle doit suffire à 'alimentation du moine et de son serviteur pendant toute l'année, en attendant la saison des pluies suivante (il n'y a pas de source au monastère). la couleur verdâtre de l'eau à cette saison ne donne pas vraiment envie d'en boire....


Deux pèlerins

Oui, ce sont bien eux

Nous repartons de Debre Damo en direction d'Adigrat par une piste d'une trentaine de km en très bon état. 


Ferme tigréenne typique

Autre ferme avec sa citerne pluviale




Cinquante kilomètres après Adigrat (la deuxième ville du Tigré après Mekele), nous arrivons au monastère de Mehdane Alem. Nous traversons un bosquet. Deux vieilles femmes grimpent doucement le sentier vers l'église. 


Vision extraordinaire, hors du temps. J'y vois une gravure du XIXème siècle. Il suffit de passer en noir et blanc. 




Ferme du Tigré


Nous arrivons devant l'église troglodyte.







Plafonds sculptés éclairés à la bougie