dimanche 21 octobre 2012

De Mekele au rebord du Rift, en Tigrée


 Fin septembre, avec quelques collègues européens, nous décidons de nous rendre dans le désert des Danakils pour analyser sur place les conditions de sécurité. En janvier dernier, un groupe de touristes européens a été attaqué par un groupe terroriste alors qu’ils dormaient sur le volcan Erta Ale. Cinq ont été tués, plusieurs blessés et deux ont été enlevés pendant un mois.

Pourtant, la pression des Tour opérateurs est forte pour que les groupes puissent revenir dans cette région et nous savons que de nombreux touristes sont revenus bien que le Quai d’Orsay comme tous les autres ministères des affaires étrangères ait mis la zone « en rouge ». Nous voulons nous rendre compte des conditions de sécurité pour voir si nous pouvons raisonnablement faire évoluer notre avis. Nous allons donc passer un week end dans le Dallol puis un de mes collègues se rendra le week end d’après sur le Erta Ale. Nous voyageons comme des touristes « normaux » sans signaler aux autorités notre statut et notre déplacement pour se rendre compte de ce qui a été fait depuis janvier.

Nous partons d’Addis le samedi matin par le vol d’Ethiopian qui nous amène à 8h à Mekele, la capitale du Tigré. Comme toujours, le paysage est extraordinaire vu de haut, surtout en cette saison, alors que les pluies viennent de s’achever et que la campagne est verte partout.


Nous nous arrêtons dans Mekele pour boire un café avant de nous embarquer pour 7 heures de route. C’est une ville de 150.000 habitants, sans charme particulier, en plein développement comme toutes les villes du pays.


Elle comptait 10.000 habitants il y a une quinzaine d’années.

 Nous prenons ensuite la route goudronnée en direction de la frontière érythréenne sur une quarantaine de kilomètres.




Nous la quittons alors pour nous engager sur la piste qui va nous conduire dans le désert des Danakils six heures plus tard, à environ 120 km de là. Nous sommes à 2500 mètres d’altitude. Nous allons descendre à 120 mètres sous le niveau de la mer.



Nous traversons une belle campagne couverte de champs de tef et d’orge, encore verts, qui ondulent lentement dans le vent. Les champs sont piqués d'oliviers pluri-centenaires..





Nous arrivons ensuite dans un gros village. C’est jour de marché.



Ambiance colorée, calme des échanges.



Les gens vaquent à leurs occupations, marchandent sans se soucier le moins du monde de notre présence, sauf les enfants qui veulent être pris en photo.























Le numérique permet de leur montrer immédiatement le résultat. Ils repartent en riant.

Nous repartons et arrivons au bord du premier escarpement. Descente d’environ 1000 mètres en deux heures. La piste est assez difficile car une route est en construction. Travaux impressionnants comme toujours. D’ici deux ans, une route goudronnée remontera des Danakils  pour permettre aux camions de passer. L’Ethiopie a en effet entrepris d’exploiter la potasse qui surgit dans le désert.







La température monte lentement et le paysage s’assèche. Les champs laissent place à une savane de plus en plus clairsemée. Nous quittons le Tigré pour entrer en pays afar. Contrôle de police. Dernier arrêt dans un café. A partir de là, nous sommes obligés de prendre avec nous deux policiers afars équipés de vieilles Kalachnikov.




Poursuite de notre descente. Il fait maintenant environ 35 ° à 15h quand nous passons la côte 1000 m. Les montagnes désertiques laissent apparaître des dessins géologiques extraordinaires. Le chaos des plissements est spectaculaire.
















Nous arrivons vers 17 heures au dernier « village » avant le désert. Nous sommes à moins 80 mètres. Il fait un peu moins de 40°, très secs, ce qui les rend parfaitement supportable. Le village, constitué de huttes en branchages, est encore peu occupé à cette saison. L’activité commence à reprendre après cinq mois pendant lesquels il est pratiquement impossible de vivre dans cet enfer (la température à l’ombre oscille entre 50 et 60°….et il n’y a pas d’ombre). Mais les premières caravanes de dromadaires reviennent pour exploiter le sel des Danakils. Le village recommence à vivre. La garnison de 80 militaires éthiopiens présente se sentira un peu moins seule. On ne peut manquer de penser au livre de Dino Buzatti, « le désert des Tartares » qu’il a écrit en s’inspirant d’un lieu identique, à la frontière avec Djibouti.

















La nuit tombe vers 18h. Une douche sommaire (nous avons droit à 3 litres d’eau), un bon dîner dans une brise chaude et nous nous couchons en plein air, sur des lits de cordes tressées, à l’auberge des mille étoiles……